Européennes : vers un essor de l'extrême droite ?

Dix jours avant les européennes du 9 juin prochain, les sondages prédisent une forte poussée des partis d'extrême droite et populistes affiliés au groupe Identité et démocratie (ID) : avec le groupe Conservateurs et réformistes européens (CRE), auquel appartient également Fratelli d'Italia, ils pourraient décrocher plus de 20 pour cent des sièges. Les chroniqueurs évoquent les possibles conséquences.

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In.gr (GR) /

Donner une alternative aux classes moyennes et ouvrière

Le portail In déplore l'absence d'alternatives à gauche :

«La crise de la vision européenne est appelée à se poursuivre et l'extrême droite à gagner du terrain. A moins que l'Europe n'assiste à l'émergence de partis de gauche, populaires et progressistes, qui s'avèrent à la fois radicaux et pragmatiques face à la multiplication des crises, afin que les classes moyennes et ouvrière puissent retrouver un point de repère.»

Večer (SI) /

La nécessité d'une politique plus sincère

Večer défend la cause des partis pro-européens, avec un bémol cependant :

«Donner sa voix à des populistes, c'est donner privilégier la mort lente de l'idée européenne. La seule alternative réaliste consiste à voter pour des forces pro-européennes et pro-démocratiques, même si leur action est peu reluisante ces derniers temps. Il ne faut plus les suivre aveuglément, elles ne le méritent plus. Dire non au populisme aux européennes n'est qu'un premier pas. Mais il faut aussi exiger des forces pro-européennes une politique plus qualitative, plus honnête et plus digne de confiance. Sinon, personne ne pourra freiner le populisme dans cinq ans.»

El País (ES) /

Former une coalition pour les droit humains

Dans El País, la climatologue Friederike Otto appelle à faire barrage à l'extrême droite :

«L'AfD, le FPÖ ou Fratelli d'Italia tentent de démanteler les acquis du passé en matière d'égalité des droits et d'entraver l'accès aux plates-formes qui permettent de lutter pour ces droits. ... Dans ces élections européennes, la question n'est pas de trouver un parti avec lequel on soit d'accord à 100 pour cent, mais plutôt de forger des coalitions favorables aux droits humains. ... Personne n'a le droit de laisser triompher le cynisme et de laisser l'Europe devenir un lieu où les structures totalitaires peuvent prospérer à nouveau. En dépit de la frustration que nous inspirent de nombreux partis, l'inaction est une impasse. ... Nous disposons d'un pouvoir, et il faut l'utiliser.»

republica.ro (RO) /

Les petits arrangements de la droite

Le PPE pourrait bientôt faire cause commune avec les partis d'extrême droite, redoute republica.ro :

«Le PPE maintient officiellement le principe d'un cordon sanitaire pour isoler l'extrême droite au Parlement européen. Mais loin de la lumière des projecteurs, les eurodéputés PPE, qui sont certains d'obtenir un nouveau mandat, se préparent à coopérer avec l'extrême droite dans plusieurs domaines, même sans accords formels. Car telle est la politique aujourd'hui : ce que l'on raconte aux électeurs pour obtenir des voix est une chose, ce que l'on fait pour conforter son pouvoir une fois que le peuple nous a donnés un nouveau mandat en est une autre.»

Der Spiegel (DE) /

Un cercle vicieux

Nikolaus Blome, chroniqueur de l'hebdomadaire Der Spiegel, a une vision sombre de l'avenir :

«S'ils seraient absolument incapables de gouverner, [les europhobes] seront toujours capables de bloquer le bon fonctionnement d'un gouvernement. ... Pour exister dans le quotidien parlementaire malgré les europhobes, les partis pro-européens vont devoir surmonter les clivages droite/gauche concernant le climat, le social et l'économie - des divergences notables même si elles ne sont pas nouvelles. Les stratèges de l'AfD tablent sur l'exaspération et la déception des électeurs - ce qui aboutira in fine à des majorités sans conscience et oublieuses de l'histoire, qui ne veulent plus d'élections du Parlement européen. C'est ce qui explique la situation actuelle et ce qu'elle a de tragique : ce scrutin pourrait être porteur du poison qui le tuera.»

Deutsche Welle (BG) /

Un souverainisme néfaste pour la Bulgarie

Les partis d'extrême droite eurosceptiques veulent vider l'UE de sa substance, assure le service bulgare de Deutsche Welle :

«Sur le papier, ils acceptent les structures et les règles de l'UE. Mais c'est pour mieux détruire l'édifice européen de l'intérieur, au prétexte de vouloir l'améliorer. Même si l'on part du principe qu'il ne s'agit pas d'un prétexte, mais d'une conviction intime des politiques de ces partis, il faut se poser une question essentielle : cette 'Union améliorée' des Etats souverains continuerait-t-elle d'être aussi bénéfique à la Bulgarie ? Certainement pas.»

Expressen (SE) /

La fin des majorités centristes stables

L'eurodéputée suédoise Sara Skyttedal a été privée de soutien et de temps de parole par le PPE, depuis qu'elle a annoncé qu'elle serait la candidate d'une nouvelle alliance eurosceptique en juin. Expressen explique cette mesure :

«Les présidents de groupes parlementaires n'étaient pas si stricts par le passé. Possibilité était donnée de 'voter avec le cœur'. Mais c'est parce que les grands groupes du centre disposaient jadis d'une majorité stable. ... Or les rapports de force au Parlement évoluent. Après les élections de juin, lors desquelles un grand essor de l'extrême droite est attendu, ils seront probablement encore plus volatils. Le groupe PPE se retrouve donc contraint de sévir dans ses propres rangs pour faire passer des décisions importantes.»

IQ (LT) /

L'heure des populistes

Dans IQ, Kotryna Tamkutė, cadre du think tank libéral Lithuanian Free Market Institute, compare cette année électorale aux JO :

«Les analystes du think tank suédois Timbro ont estimé que le soutien témoigné aux partis populistes était de l'ordre de 10 pour cent en 1950, contre 27 pour cent en 2023. ... Si tous les acteurs politiques participaient cet été à l'ouverture des JO, un quart d'entre eux se rangerait derrière la bannière populiste. Les scrutins de l'année dernière ont également confirmé que l'on vit à une époque où le populisme n'est plus un simple concept, mais la réalité de l'ordre politique.»